Tests ADN : eldorado génétique ou atteinte à la vie privée ?

Bastien Dubuc 4 sept. 2019

Alors que les tests ADN sont interdits en France, sauf dans certains cas prévus par la loi, 51 % des Français souhaiteraient y avoir recours. On estime même aujourd’hui que 100 000 personnes en France ont déjà sauté le pas et partagé leurs données génétiques avec des entreprises étrangères…

Selon Claude Levi-Strauss, « chercher ses racines, c'est au fond se chercher soi-même : qui suis-je ? Quels sont les ancêtres qui m'ont fait tel que je suis ? » Un questionnement d’actualité, compte tenu de la popularité actuelle des tests génétiques. Malgré leur interdiction dans l’hexagone, on estime ainsi que 100 000 français ont sauté le pas et partagé leurs données génétiques avec des entreprises étrangères… sans parfois connaitre les conditions de stockage, de sécurité et d’utilisation de ces informations sensibles.

Que l’arbre généalogique se dresse comme un majestueux chêne, ou s’étire de l’est à l’ouest en des douzaines de branches et autant de pays, de nombreuses personnes souhaitent actuellement découvrir leur héritage génétique. Les informations que l’on peut obtenir via un test sont significatives, et peuvent se révéler être une récompense ou un fardeau. Il est en effet possible de retrouver des membres de sa famille, de découvrir de quelles régions viennent nos ancêtres ; mais aussi de savoir si l’on est prédisposé à des maladies, telles qu’Alzheimer, à des mutations génétiques qui peuvent mener au cancer, ou encore mettre à jour des secrets de famille. En échange d’un peu de salive via un kit envoyé à domicile, et pour à peine 100 euros, c’est une véritable boite de pandore qui est à disposition.

Les informations de 100 millions de personnes stockées d’ici 2021

Outre le risque psychologique, des organisations peuvent aussi récupérer ces données ADN en vue d’utilisations très discutables. Les informations génétiques sont des données très précieuses et profitables, en particulier pour les forces de l’ordre, les laboratoires pharmaceutiques et les développeurs d’applications. Or, des experts estiment que si l’intérêt actuel du public persiste, ces bases de données génétiques privées posséderont les informations de 100 millions de personnes d’ici 2021. Une véritable mine d’or pour ces trois acteurs !

  • Les forces de l’ordre – Les informations génétiques contribuent à résoudre des enquêtes. Ainsi, la police américaine a utilisé la base de données de l’entreprise GEDmatch - aujourd’hui fermée - pour trouver des criminels, via l’ADN de leurs proches stocké sur cette plateforme. Cependant, aucune des personnes concernées n’avaient été informée de cet usage. L’accès à des données génétiques de personnes innocentes de tout crime par la police pose donc des questions d’éthique et de protection de la vie privé.
  • Les laboratoires pharmaceutiques – De nombreux clients autorisent l’utilisation de leurs données pour des programmes de recherche, souvent en pensant soutenir les avancées médicales. En effet, certaines des entreprises ont des partenariats avec de grands acteurs de la Santé. Là encore, il existe un risque : les laboratoires pourraient utiliser ces données ADN pour identifier d’éventuels futurs malades, majorer ou minorer les polices d’assurance en conséquence, sans oublier la recherche d’eugénisme.
  • Les développeurs d’applications– Avec les données génétiques, ils peuvent concevoir des services plus personnalisés, notamment pour les applications de fitness et de bien-être, adaptant leur produit pour viser les besoins biologiques de chacun. Mais la génétique seule ne peut pas tout expliquer, ou être l’unique source d’information ; l’environnement et le mode de vie jouent en effet un rôle clé dans l’expression des gènes et la santé d’une personne.

L’éthique et la protection de la vie privée sont des risques significatifs à garder en tête lors de l’achat d’un kit de test ADN en ligne. Il est facile d’oublier qu’il ne s’agit pas d’entreprises de santé publique, mais bien d’organisations lucratives qui vendent un produit, tout en collectant et stockant des informations sensibles. Or, en cas de fuite de données – accidentelle ou criminelle – cela peut donner suite à des discriminations par des employeurs, des compagnies d’assurances, ou encore des banques. En outre, ces tests étant récents, il existe actuellement un vide juridique et aucune loi n’est dédiée à la protection de ces clients.

Par conséquent, avant d’envisager de partager sa salive, il est primordial de s’assurer que l’entreprise choisie propose les politiques et procédures suivantes : suppression des informations personnelles sur simple demande, destruction de l’échantillon ADN après analyse, et non utilisation des données génétiques à des fins de recherches ou par des tiers. Découvrir l’histoire de ses ancêtres ne devrait en effet jamais signifier une mise en danger de sa vie privée.

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